Le Tribunal administratif d’Amiens valide partiellement l’arrêté du maire de Pont-Sainte-Maxence réglementant la chasse à courre sur le territoire de la commune.
Publié le :
06/05/2020
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Le maire de la commune de Pont-Sainte-Maxence, dans l’Oise, a édicté le 1er mars 2018 un arrêté visant à réglementer la chasse à courre sur le territoire de la commune dont la légalité a été contestée devant le Tribunal administratif d’Amiens par la fédération départementale des chasseurs. Le Tribunal administratif d’Amiens a rendu sa décision le 6 mars 2020 (n° 1801168).
L’arrêté en question a interdit la chasse à courre dans toute l’agglomération à proximité des secteurs urbanisés et dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations voire de 400 mètres dans certains quartiers. Il proscrit que les animaux chassés soient mis à mort dans l’agglomération et fait obligation aux veneurs et à leur équipage de ne pas franchir le domaine public routier communal lors des chasses à courre.
Cet arrêté soulevait deux questions principales. En premier lieu la compétence du maire pour édicter un tel arrêté et en deuxième lieu la proportionnalité de la limitation du droit de chasser.
Sur le premier point, le Tribunal constate que la police de la chasse constitue une police spéciale relevant de la compétence de l’Etat, mais admet que cela n’empêche pas le maire d’agir s’il justifie de circonstances locales. Dans cette affaire, le juge estime qu’il existe des circonstances locales, que le Conseil d’Etat qualifie habituellement de « particulières ».
Ces circonstances locales tiennent au fait que :
- « plusieurs incidents récents ont eu lieu sur le territoire de la commune de Pont-Sainte-Maxence. Ainsi, à plusieurs reprises, des chiens de meute de chasse errant dans les rues de la commune ont été repérés. Il est constant, de plus, que le 3 février 2018, un cerf poursuivi par les chiens d’une meute de chasse à courre s’est réfugié dans la commune de Pont-Sainte-Maxence en empruntant des voies routières fortement fréquentées. L’animal est resté plusieurs heures dans les rues du centre-ville de la commune. Sa présence a nécessité l’intervention des services de gendarmerie et de la police municipale pour assurer une zone de sécurité autour de lui afin de lui injecter un tranquillisant et l’évacuer ».
- « les incidents répétés liés à la chasse à courre (…) sont constitutifs de troubles à la tranquillité et à la sécurité publique justifiant l’usage par le maire de ses pouvoirs de police générale ».
D’autre part, sans nier l’émoi qu’a pu provoquer l’incident du cerf réfugié auprès du voisinage, ainsi qu’auprès des veneurs sans aucun doute, il convient quand même de relever une appréciation contestable des « circonstances locales » de la part du juge administratif en l’espèce. En effet, ce dernier analyse un seul évènement en date du 3 juillet 2018 comme étant constitutif de « circonstances locales ». Le fait que des chiens de chasse égarés aient été repérés n’a aucune influence sur cette dernière qualification de « circonstances locales » et ne sert qu’à densifier l’argumentaire du juge semble-t-il.
Sur le second point, le juge doit se prononcer, de façon tout à fait classique, sur la proportionnalité de la mesure prise par le maire au regard des faits de l’espèce.
Le Tribunal administratif d’Amiens admet la proportionnalité de l’arrêté du maire en ce qu’il prohibe la pratique de la chasse à courre dans les secteurs urbanisés de la commune et dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations voire de 400 mètres dans certains quartiers et en ce qu’il interdit la mise à mort des animaux chassés dans l’agglomération. Cette appréciation souveraine du juge apparaît légitime, mais cette distance, somme toute assez importante, porte aussi en germe, au regard de l’urbanisation diffuse que l’on connaît en France, de repousser toujours plus loin les limites du territoire de chasse. Une rapide vue aérienne sur la commune de Pont-Sainte-Maxence permet aussi de voir que cette distance réduit presque à néant la possibilité d'y chasser à courre. La question de la proportionnalité de ces distances devrait être appréciée en fonction de la configuration de la commune.
En revanche, il convient de le souligner, l’obligation faite aux veneurs et à leur équipage de ne pas franchir le domaine public routier communal lors des chasses à courre est jugée disproportionnée.
Le Tribunal considère que cette disposition :
- « impose une interdiction générale qui vient fortement entraver voire empêcher la pratique de la chasse sur l’ensemble du territoire de la commune y compris dans les secteurs non urbanisés »
Le juge se rend compte, à la différence du point précédent, qu’une telle mesure a pour effet d’empêcher la pratique de la chasse sur l’ensemble du territoire de la commune. Là aussi, la configuration du réseau routier français fait qu’une interdiction de le franchir empêcherait toute activité de vénerie à n’en pas douter.
Pour conclure, il convient de mettre l’accent sur l’encadrement du pouvoir de police générale des maires. Ces derniers ne peuvent évidemment pas édicter une interdiction générale et absolue. Ils ne peuvent limiter la pratique de la chasse à courre que s’ils justifient de « circonstances locales particulières » et en prenant des mesures proportionnées notamment au regard de la distance vis-à-vis des habitations. En revanche, en l’état de la jurisprudence, l’interdiction de franchir le domaine public routier communal par les chasseurs est jugée disproportionnée.
Hubert Delzangles,
Professeur de droit public,
Consultant, cabinet ARCC.
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