Les tiers peuvent-ils contester un certificat de projet ?
Publié le :
15/02/2019
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CAA Bordeaux, - 1ère chambre - 27 décembre 2018 - Association de défense du Val de la Dronne et de la Double et autres, n°17BX00034
Une association de protection de l’environnement et des riverains d’un futur projet d’éoliennes ne justifient pas d’un intérêt à agir contre un certificat de projet.
Par un arrêt en date du 27 décembre 2018, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé que l’association de protection du Val de Dronne et de la Double et les riverains au projet ne justifiaient pas d’un intérêt à agir contre un certificat de projet relatif à la création d’un parc éolien délivré par le préfet en application des dispositions de l’ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’un certificat de projet.
Pour rappel, le certificat de projet est un document délivré à titre expérimental par le préfet de département sur le territoire d'une des régions Aquitaine, Bretagne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Ile-de-France ou Rhône-Alpes, lorsque le projet en question requiert la délivrance d'au moins une autorisation régie par le code de l'environnement, le code forestier ou le code de l'urbanisme (article 1 de l’ordonnance précitée). Il s’inscrit à ce titre dans une logique de simplification et d’accélération des procédures et a pour effet de cristalliser le droit applicable au projet pendant 18 mois.
Dans l’affaire commentée, le Préfet de la Dordogne avait délivré deux certificats de projet à la société Abowind, portant sur la réalisation d'un parc éolien de cinq aérogénérateurs.
L'Association de défense du Val de Dronne et de la Double et des riverains au projet ont ensuite demandé à la juridiction administrative d’annuler les arrêtés du préfet portant délivrance d’un certificat de projet.
Après un rejet de leur demande en première instance devant le tribunal administratif, les requérants ont porté le litige devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Cette dernière s’est finalement prononcée le 27 décembre 2018 sur la recevabilité de leur demande.
A ce titre, elle a estimé que les requérants ne justifient pas d’un intérêt à agir contre les arrêtés portant délivrance du certificat de projet.
En effet, elle considère que « la qualité des informations mentionnées par le certificat au titre du I de l’article 2 précité ne peut affecter que le porteur du projet, de même que les engagements sur les délais maximaux d’instruction pris au titre du II du même article, et la circonstance que les dispositions législatives et réglementaires régissant les procédures et décisions administratives nécessaires à la mise en œuvre du projet à la date de notification du certificat restent en principe applicables à ce projet dès lors que la demande est adressée à l'administration dans le délai mentionné à l’article 3 précité, n’est pas de nature, en elle-même, à donner aux requérants un intérêt suffisant pour en demander l’annulation. »
Selon la demande présentée au préfet, le certificat comprend généralement les informations suivantes : les régimes, décisions et procédures applicables au projet, la description des étapes de l’instruction de la demande, la liste des pièces requises, ou encore les éléments de droit pouvant faire obstacle à la réalisation du projet.
Pour les juges d’appel, ces informations n’intéressent que le porteur de projet et ne sont pas de nature à faire grief aux tiers. Autrement dit, elles ne confèrent pas un intérêt à agir à d’éventuels requérants contre les certificats de projet litigieux.
Il convient ici de noter que le certificat de projet ne confère a priori aucune assurance au bénéficiaire que ledit projet sera réalisé, contrairement au certificat d’urbanisme opérationnel, qui lui peut faire l’objet d’un recours exercé par les tiers.
Pour mémoire, le certificat d’urbanisme est un document délivré par la commune qui dresse l’état des lieux d’un terrain. A ce titre, il indique les dispositions d’urbanisme, limitations administratives au droit de propriété et les taxes et participations d’urbanisme applicables au terrain concerné. Et surtout, il signale lorsque la demande concerne une opération particulière, si celle-ci est réalisable sur ce terrain (article L. 410-1 du code de l’urbanisme).
Or, la jurisprudence retient à propos des certificats d’urbanisme qu’« eu égard aux effets qu'ils sont susceptibles d'avoir pour leurs destinataires et pour les tiers intéressés, les certificats d'urbanisme (…) doivent être regardés, que la demande à laquelle ils répondent ait ou non précisé une opération particulière, comme des décisions administratives susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. » (Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 06/06/2012, M. et Mme Vidal, n°329123).
Un tel certificat d’urbanisme opérationnel, lorsqu’il indique que le projet est réalisable, confère à son bénéficiaire la garantie qu’il obtiendra le permis de construire correspondant (sous réserve de questions de sécurité et salubrité publiques et des conditions éventuelles du certificat).
Cette différence avec le certificat de projet permet donc d’expliquer pourquoi les tiers se trouvent dans l’incapacité de le contester devant le juge administratif.
Au surplus, il convient de souligner que la décision commentée concerne le certificat de projet délivré à titre expérimental sur le fondement de l’ordonnance de 2014 précitée, applicable jusqu’au 31 mars 2017. Depuis, le certificat de projet a été intégré au code de l’environnement aux articles L. 181-6 et R. 181-4. Il est d’ailleurs intéressant de noter que l’effet cristallisant du certificat n’existe plus dans cette nouvelle version.
A-F.G.
Sources :
- Ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’un certificat de projet (JORF n°0068 du 21 mars 2014 page 5628) ;
- CAA Bordeaux, - 1ère chambre - 27 décembre 2018 - Association de défense du Val de la Dronne et de la Double et autres, n°17BX00034 ;
- Article L. 410-1 du code de l’urbanisme ;
- Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 06/06/2012, M. et Mme Vidal, n°329123 ;
- Articles L. 181-6 et R. 181-4 du code de l’environnement.
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